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    « Je vous attends demain, miss Chapman ! Je compte sur vous, n’est-ce pas ?

    - Cher colonel, c’est avec joie que j’accepte votre invitation. Rien ne saurait me faire plus plaisir ! »

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      Johanne laissa l’homme lui baiser la main une fois de plus et s’assit dans l’aéroglisseur qu’il lui prêtait pour retourner à son hôtel. Le concert solo avait été un succès, sa voix rauque ayant réussi à donner l’illusion encore une fois qu’elle était une professionnelle. Amalric n’avait pas attendu que les applaudissements aient cessé pour venir la féliciter et recommencer sa cour. Elle avait supporté ses assiduités et les avait même encouragées avant de feindre un étourdissement. Elle avait prétexté la fatigue due aux deux concerts. Le colonel s’était empressé d’offrir son chauffeur, ce que Johanne attendait avec intérêt. Elle se laissa aller contre le dossier, feignant de somnoler, mais à travers ses longs cils, elle ne perdait pas de vue leur progression. Elle savait où elle devait agir, pour ne pas échouer. Elle n’avait pas le droit d’échouer !

      Comme prévu, le chauffeur dut ralentir pour passer le virage étroit. Johanne prit une grande aspiration en sortant la seringue de son sac. Le véhicule était presque arrêté lorsqu’elle planta l’aiguille dans la nuque de l’homme. Celui-ci freina brusquement avant de s’effondrer sur le volant, ce que Johanne espérait.

      Elle se hâta de descendre et ouvrit la portière. L’homme n’était pas trop grand et son habit lui irait parfaitement. En peu de temps, elle enfila ses vêtements. Elle ligota l’homme inconscient qu’elle hissa avec difficulté dans le coffre. Le reste ne fut qu’un jeu d’enfant. Elle conduisit tranquillement jusqu’à son hôtel, puis fit demi-tour et rentra à la propriété d’Amalric, comme si rien ne s’était passé. Le portail s’ouvrit grâce au badge électronique du chauffeur. Les vigiles ne remarquèrent rien d’anormal. Johanne s’introduisit sans aucune difficulté dans le grand salon d’Amalric. La pièce était plongée dans l’obscurité, mais elle avait bien repéré les lieux. Elle se dirigea jusqu’à la statue. Un petit interrupteur permettait d’éclairer la niche où se tenait… Wendy Paresc ?

      Émue, Johanne retrouva en effet les traits de sa mère sur le visage de marbre noir et chercha comment libérer Altaïr. Il devait bien y avoir un mécanisme électronique… Elle découvrit enfin le boîtier où devaient se trouver les commandes, dans le socle de la statue. Avec précipitation, elle ouvrit le couvercle. Des boutons lumineux… Il s’agissait vraiment d’un hibernateur !

      Elle n'hésita pas à baisser le levier qui devait permettre de libérer Wendy de la gangue de marbre qui la retenait prisonnière.

      Johanne recula d’un pas, lorsqu’un rayon rouge venu d’un émetteur fixé au plafond tomba sur la statue. Au bout de quelques secondes, le marbre noir se fendilla.

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    La roche dure se brisa en des milliers de morceaux qui tombèrent sur le sol, comme une nuée de cendres. Le corps d’Altaïr apparut alors, rigide et blanc.

      Johanne regardait cette statue humaine, les yeux écarquillés d’horreur. Soudain la peau reprit une teinte rosée. Les muscles durcis par l’hibernation se relâchèrent. La jeune femme bondit en avant pour retenir sa mère dans ses bras et empêcher qu’elle ne s’écrase sur le sol. Le corps resta inerte quelques secondes avant que les fonctions vitales ne reprennent, brusquement. Elle sentit le cœur recommencer à battre, la respiration se remettre en place… Les yeux s’ouvrirent brusquement, comme ceux d’une poupée mécanique. La bouche s’entrouvrit sur une inspiration suffoquée.

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     - Cal ! Je vous en prie ! Ne me faites pas ça ! gémit Wendy Paresc. Pitié !

      Johanne se souvint que sa mère était déconnectée du monde depuis onze ans. Malgré l’envie qu’elle avait de la serre fort contre elle, elle savait qu’elle ne devait pas lui révéler son identité à brûle-pourpoint. Le choc risquerait d’être trop fort. Elle décida de ne rien lui dire. Sa peau sombre allait l’aider.

    - Chut ! souffla-t-elle d’une voix tremblante. Je ne suis pas Amalric, Wendy !

      Altaïr sembla reprendre conscience. Son esprit était encore embrumé, mais elle s’écarta de Johanne, méfiante.

    - Qui êtes-vous ? Où suis-je ?

      Johanne se sentit envahie par la joie en entendant de nouveau cette voix chérie qu’elle n’aurait jamais cru réécouter un jour.

    - Répondez ! Où est Amalric ?

    - Je vous en prie, taisez-vous ! chuchota Johanne en essuyant ses larmes. Nous sommes dans le salon de ce salaud qui vous utilise comme œuvre d’art. Il nous faut partir, venez !

      Wendy se mit à frissonner, nue sur le carrelage. Johanne fronça les sourcils. Elle n’avait pas songé à ça… Mais elles étaient toutes deux de la même taille… Johanne se dressa d’un bond. Elle se débarrassa des vêtements du chauffeur sous le regard perplexe de sa mère. Elle avait gardé dessous son costume de scène.

    - Mettez ceci !

    - Je veux d’abord savoir qui vous êtes !

      Johanne hésita. Elle savait que si elle avouait la vérité, elle paralysait Wendy.

    - Je… Je m’appelle Loreen. C’est quelqu’un qui vous aime, qui m’envoie. Je ne peux dire son nom, mais vous l’appeliez Loup.

    - L’homme qui m’aime… Je vous fais confiance.

      Wendy enfila rapidement les vêtements.

    - Ne vous ai-je jamais vue ? demanda-t-elle en fixant le visage de sa fille.

      Gênée, Johanne secoua la tête.

    - Jamais ! Venez avec moi, nous ne pouvons pas rester là !

      Wendy hocha la tête.

    - Vous avez raison.

      Les deux femmes quittaient le salon lorsqu’une sirène se déclencha, vrillant leurs oreilles. Johanne poussa sa mère dans un coin de la pièce et elles se dissimulèrent derrière le socle d'une gigantesque statue.

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       Le colonel Amalric fit son entrée dans le salon et éclaira la lumière. Il avança d’un pas. Il crispa les mâchoires en constatant la disparition de sa statue préférée.

    - Alerte ! Trouvez-moi les deux femmes qui doivent se cacher quelque part dans cette baraque ! Ne les tuez pas, mais ramenez-moi ces deux garces !

      Il n’avait pas terminé son hurlement hystérique que le bruit assourdissant d’une explosion se fit entendre. La propriété du colonel Amalric était bombardée. Celui-ci lança une dizaine de jurons avant de quitter la pièce en courant.

    - Venez ! souffla Wendy. Je sais comment nous allons pouvoir sortir de là ! Je connais bien la maison…

      Johanne suivit sa mère dans les couloirs sombres de la propriété. Elles parvinrent sans encombre dans le sous-sol du bâtiment.

    - Il existe une issue qui permet de sortir directement sur la route. expliqua-t-elle. Elle se trouve dans le cagibi du fond si je me souviens bien.

      En effet, elle fit pivoter une poignée dans le sens inverse normalement utilisé. Une ouverture apparut dans le mur.

    - La sortie est au bout ! souffla Wendy.

      Johanne se retourna brusquement. Elle entendit le piétinement des hommes du colonel Amalric dans l'escalier. La voix de celui-ci se rapprochait. Elles n’avaient plus le temps. Sans hésiter, elle lui tendit son sac.

    - Altaïr ! Vous devez survivre ! Je n’ai aucune importance pour la Révolution, vous si ! Si nous sortons toutes les deux, il nous poursuivra ! Je vais le retenir ! Partez à l’astroport ! Rejoignez le Hook et Sham ! Vite ! Sham ! Le vaisseau appelé Hook !

      Disant ces paroles, elle poussa brusquement sa mère à l’extérieur et referma le passage avant de se réfugier dans la pièce d'à-côté. Elle essayait de déverrouiller une porte, le cœur battant lorsqu'un ordre la fit se retourner lentement.

    - Loreen Chapman ? s’exclama Amalric. C'est toi la responsable de ce carnage ? C'est toi qui as coordonné les bombardements ? Où est Altaïr ?

      Johanne essaya de ne pas montrer sa terreur.

    - Je ne suis pour rien dans l'attaque ! Altaïr n’est pas ici ! Je savais qu’elle aurait plus de chance si nous nous séparions. Elle n’est plus avec moi !

      Amalric s’approcha, menaçant.

    - Où est-elle ?

    - Dehors ! Si vous êtes là, alors elle a réussi à vous échapper. Elle va reprendre la lutte contre l’Union ! jeta Johanne. Sa légende est toujours vivante, sa résurrection galvanisera les gens. Elle finira bien par vous détruire !

          Hors de lui, Amalric l’attrapa par le bras. Il la secoua violemment avant de la projeter sur le sol. La tête de la jeune fille heurta le mur. Elle perdit connaissance.

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     Suite du chapitre 8


  • Commentaires

    1
    Ness Profil de Ness
    Dimanche 19 Mai 2013 à 20:42

    Je suis contente qu'elle ait réussi à faire évader sa mère, mais je crains le pire pour elle maintenant qu'elle est à la merci de ce malade...

    2
    Mercredi 24 Juillet 2013 à 11:49

    Oh putain o_o

    C'est génial pour sa mère mais quelle idée de rester en arrière !! 

    3
    Dimanche 15 Mars 2015 à 11:31

    Vous avez le mal de l'hibernation. votre vue reviendra en temps et en heure.

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