• 2-1

    « Comment est-ce possible ?

    - Je ne sais pas, monsieur. Je l’ignore !

    - Et vous, vous savez quelque chose ?

    - Je suis désolé…

    - Je me fiche de savoir que vous êtes désolé ! hurla l’administrateur Pedro Venegas face aux dix soldats qui le regardaient. Je veux une réponse claire et précise. Que s’est-il passé sur Endymion ? Pourquoi l’équipe a-t-elle été prise ? Comment une opération menée avec autant de précautions a-t-elle pu aboutir à l’exécution de six de nos partisans ? Le plus jeune d’entre eux avait dix-neuf ans !

    - Laissez-les en paix ! Ils n’y sont pour rien ! » 2-1

       Tous se tournèrent vers le sas d’entrée où un homme venait de faire son apparition. Vêtu de noir, il était plus grand et musclé que l’administrateur. Le regarder en face était impressionnant à cause du masque métallique sombre qui recouvrait les trois-quarts de son visage à l’exception de sa bouche et de son menton. Ce genre de masque servait en médecine, pour réparer ou compenser des blessures graves au niveau des yeux ou du visage. On racontait qu’il était revenu défiguré d’un bannissement injuste sur la planète grise, lorsqu’il était adolescent. Mais personne ne revenait de la planète grise.

    - Vous ne résoudrez pas le problème ainsi. répéta le nouveau venu d’un ton las.

    - Restez à votre place, Sham ! Ceci n’est pas de votre ressort.

    - Vous comptez donc clore cette affaire comme vous l’avez menée, sans en référer à quiconque ?

      Le général Pedro Venegas écarquilla les yeux, de même que les dix techniciens présents.

    - Qu’insinuez-vous ?

    - En notre sein, il y a une taupe, que je traque depuis deux mois…

    - Absurde ! Le Conseil n’aurait jamais…

    - Je n’avais aucune preuve et le Conseil a refusé de me croire.

    - Et vous avez des preuves maintenant ?

    - Oui, Venegas. J’ai un nom et des preuves irréfutables. L’équipe envoyée comptait sept partisans.

    - Co… Comment… Venegas se troubla.

    - Je suis resté à bord du vaisseau tandis que les six autres allaient accomplir leur mission. J’étais en liaison directe avec eux, par comlink. J’ai entendu les derniers mots de l’exécuteur de l’Union Interstellaire. Ils vous dénonçaient clairement. Depuis combien de temps…

    - Depuis la mort de ma femme. répondit l’administrateur d'un ton résigné. J’ai la même maladie qu’elle. Ils m'ont monnayé un traitement expérimental. Notre lutte est vouée à l’échec, Sham. Maria croyait notre réussite possible. Je n'y crois plus. Je ne voulais pas non plus me laisser mourir à petit feu comme elle. Il me semble préférable maintenant de la rejoindre, immédiatement. »

      Sans que Sham ait le temps de réagir, Pedro Venegas dégaina son blaster et le tourna contre lui.

    - La voilà, ta preuve, Arkab ! soupira l’homme masqué en désignant le corps qui gisait sur le sol à son ami qui venait de le rejoindre. Si tu m’avais écouté, nous aurions sauvé six vies !

     2-1

     - Je suis plus atterré que tu ne le penses, Sham. Comment pouvais-je croire ton hypothèse ? Pedro a toujours été notre plus fidèle partisan ! Même Véga et Altaïr avaient confiance en lui !

    - Nous ne pouvons pas rester ici. Il a sûrement révélé l’emplacement du croiseur du Conseil. Ordonne le départ. Je vais faire scanner l’intégralité de l’appareil, à la recherche d’un traqueur.

    - Une idée de destination ?

    - La lune noire d’Yperis.

    - Yperis ? C’est désert…  Ah oui! Hassan y est ?

    - Il m’a envoyé un message il y a deux jours.

    - Et c’est seulement maintenant que tu m’en parles ! protesta Arkab.

      Sham haussa les épaules.

    - Je ne pouvais pas t’en parler avec Venegas dans les parages. Kharizmi a besoin d’aide. Il ne peut pas accomplir sa mission tranquille. Il craint d’être espionné.

    - Lui aussi !

    - C’est sa nouvelle assistante. Elle lui a été imposée par l’Union et il sent qu’il y a quelque chose de bizarre chez elle. Contrairement aux espions habituels de l’Union, elle est hautement qualifiée dans son domaine. Il ne pourra pas la duper sur le but réel de son travail.

    - Ce projet est pourtant fondamental ! Il doit trouver ! Nous devons savoir si nos espoirs fondés !

    - Je sais bien...

    - Alors, nous partons sur le champ pour Yperis, et nous aviserons. Cette assistante devra nous livrer ses secrets. Si les craintes de Kharizmi s’avèrent justifiées…

    - Nous la renverrons à l’Union Interstellaire en pièces détachées !

     2-1

     Suite du chapitre 2


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  • 2-2

      Johanne s’essuya le front avec son bras et se releva lentement, se massant les reins. Le climat de cette planète était autrement plus torride que celui de Rhyway, sa planète natale. Elle fit levier avec  sa pioche pour faire basculer un morceau de roche et sursauta au son métallique. Elle comprit avec stupéfaction qu’elle était tombée sur la paroi qu’ils cherchaient depuis plusieurs  semaines. L’ancien bunker de l’administration Valinë mentionné dans des données retrouvées par Hassan. Rapidement, elle creusa autour. Elle avait raison !

    - Monsieur Kharizmi ! cria-t-elle. Venez voir, je vous prie !

      L’archéotechnologue jeta un regard inquiet à sa femme qui s’éloignait avec le reste de l’équipe. Elle hocha la tête en continuant son chemin et lui se dirigea vers la fosse où fouillait la jeune assistante. Il descendit dans le trou et écarquilla les yeux. Il tomba à genoux à côté d’elle et se mit à creuser lui aussi.

    - Johanne ! Est-ce que tu te rends compte ! balbutia-t-il au bout de quelques minutes. Il s’agit…

      Il se tut brusquement.

    2-2

       Johanne leva les yeux. Elle se rendit compte qu’ils étaient tous seuls. Loumé et les autres membres de l’équipe se rendaient au réfectoire lorsqu’elle l’avait appelé. C’était le moment. Depuis trois semaines qu’elle était sur le chantier, elle avait déjà fait deux rapports à Amalric, mais par bonheur, rien de suspect ne s’était déroulé sur le camp. Pourtant, elle n’en pouvait plus. Continuer à trahir le scientifique pour lequel elle ressentait beaucoup de respect et une grande affection était au dessus de ses forces. Elle avait décidé de tout lui avouer. Si jamais les soupçons du colonel Amalric étaient fondés, en souvenir de sa mère, elle préférait qu’il puisse s’en tirer. L’instant lui parut propice. Elle sentit une boule se former dans sa gorge.

    - Monsieur Kharizmi, chuchota-t-elle. Écoutez-moi. Et je vous en prie, ne m’interrompez pas. J’ai remarqué depuis mon arrivée, que vous ne me faites pas entièrement confiance. Vous avez raison. Je suis une espionne de l’Union Interstellaire et je ne le supporte plus ! Faites-moi partir, dites que je suis complètement incompétente, que je ne vous conviens pas… Chassez-moi !

    - Que dis-tu ?

      Johanne éclata en sanglots. « C’est trop dur à supporter, monsieur Kharizmi ! Le jour de mon arrivée sur Baire, j’ai été arrêtée par le colonel Amalric. Il m’a laissé le choix entre vous espionner pour son compte ou être déportée sur la planète grise. Je sais que c’était lâche de ma part, mais je n’ai pas pu refuser !

    2-2

     - Pourquoi justement toi ? Car c’est l’administration qui t’a imposée à moi !

    - C’est ma mère qui a déterminé ce choix. Ils savent tout de moi depuis que celle-ci est morte. J’ai été adoptée par la famille Dorval mais mon nom de naissance est Paresc.

    - Tu es la fille de Wendy Paresc !

      La jeune fille hocha la tête.

    - Je vous en prie, licenciez-moi ! Je ne peux plus ! Je ne veux plus trahir !

      Hassan Kharizmi sourit en se relevant. Il essayait de dissimuler son enthousiasme. Il avait enfin retrouvé la fille de Wendy. Il lui prit les mains et les serra en un geste de réconfort.

    - Ta mère était mon amie, il y a bien longtemps. Viens et calme-toi ! C’est ta première vraie découverte archéotechnologique, n’est-ce pas ?

      La jeune fille hocha la tête.

    - L’émotion justifiera tes larmes si quelqu’un d’autre nous espionne. Je me doutais que tu étais un des pions d’Amalric ou d’un autre sadique de son espèce. Mais je ne comprenais pas ton attitude. D’ordinaire les espions sont plus curieux, et plus liants ; ils essayent de se faire adopter, de devenir indispensable. Toi, tu nous fuis depuis ton arrivée, tu n’as même pas accepté mon offre de tenir à jour mon journal ; cela ne correspondait pas au schéma… J’apprécie ta franchise, Johanne.

    - Qu’allez-vous faire ? renifla-t-elle. Quand dois-je partir ?

    - Pour l’instant, tu restes avec nous. Quand doit avoir lieu ton prochain rendez-vous avec le colonel ?

    - Dans une semaine. Mais…

    - C’est bon. D’ici là, tu continues à travailler normalement avec l’équipe !

      Johanne n’en crut pas ses oreilles.

    2-2

     - Mais vous avez compris ce que je vous ai dit ?

    - Tout à fait. Tu nous espionnes pour le compte d’Amalric et tu es la fille de Wendy. Allons annoncer ta découverte à l’équipe ! Nous avons tous du pain sur la planche ! »

    Suite du chapitre 2


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  • 2-3

      Complètement détendue, Johanne travailla toute la semaine entourée de l’affection du scientifique et de sa femme. Avoir parlé l’avait complètement libérée, et elle ne songeait quasiment plus à Amalric. Le matin où elle devait aller le rejoindre, Hassan Kharizmi la déposa lui-même dans la colonie minière. Avant qu’elle ne descende du véhicule, il lui sourit.

    - Raconte-lui absolument tout ce que tu sais. Il ne faut pas que tu coures le moindre risque s’il a un autre pion dans notre équipe !

      Johanne hocha la tête. Elle pénétra résolument dans le bar. Amalric l'attendait au fond de la salle, une blonde sur les genoux l'embrassant goulument.

     2-3

     Lorsqu'il l'aperçut, il repoussa la prostituée.

    "Dégage! Je t'appelle quand j'aurai besoin de toi! Et ne t'avise pas de me faire attendre encore une fois."

    La femme baissa les yeux en s'éloignant mais Johanne ne put pas ne pas voir l'énorme cocard qui ornait sa paupière gauche. Elle frissonna.

    - Alors ? Ton rapport ?

    - Cette semaine, nous avons fait une découverte spectaculaire ! Et c’est moi qui l’ai trouvée ! ajouta-t-elle fièrement. Vous rendez-vous compte ? C’est la première enceinte d’un bunker secret qui date de plus de trois cents ans !

    - Vous avez trouvé des données à l’intérieur ?

    - Pas encore, il faut d’abord trouver le sas d’entrée, casser les codes…

    - Et c’est pour si peu que tu as une mine aussi réjouie !

    - Mais c’est une grande découverte ! C’est la première trouvaille archéotech’ de toute ma vie ! Et tout ce qui reste à faire…

      Amalric se leva brusquement, la fusillant du regard.

    - P…n, je ne t’ai pas envoyée ici pour t’entendre raconter ta vie ! Je m'en fiche de tes merveilleuses découvertes!

    - Vous avez fait erreur sur la personne, alors ! cria-t-elle plus fort que lui. Car moi je ne suis qu’une archéotech’ !

      Le colonel la plaqua violemment contre le mur et serra brièvement sa gorge d’une seule main avant de la relâcher.

    - Ne me donne pas des envies de punir tes rébellions ! sussura-t-il à son oreille. Sais-tu ce qui t’attend, si tu me prends pour un imbécile ? Et rien de neuf sur Kharizmi ?

      Johanne porta les mains à son cou, terrifiée de sentir la main du colonel sur sa hanche. Elle se mit à balbutier.

     2-3

     - Hassan Kharizmi n’a reçu aucune visite depuis le début du chantier. C’est moi qui écris ses messages à partir de son ordicom. Je vous en ai fait des doubles à chaque fois. Il ne contacte que des scientifiques de l’U.I. Il remplit tous les formulaires…

    - Ta mission va bientôt toucher à sa fin, Johanne.

      Elle leva vers lui son regard vert suppliant.

    - Ne m’envoyez pas sur la planète grise ! J’ai fait tout ce que vous aviez demandé !

    - Je n’en doute pas ! Retourne à ton chantier ! La semaine prochaine sera sans doute notre dernier rendez-vous concernant cette mission. Vous avez intérêt à ouvrir ce sas et nous quitterons tous les deux ce trou perdu !

      Johanne quitta le bar blême de peur. Hassan et Loumé Kharizmi la réconfortèrent de leur mieux mais refusèrent d’accéder à ses prières. S’enfuir était hors de question. Le seul espoir du Conseil de la révolution était peut-être derrière ce sas même si c'était au prix de leur vie.

    Chapitre 3 

     


     

    Salut à tous

    Voilà donc le chapitre 2 de cette histoire, où l'on voit apparaître le commandant Sham et son fameux masque qui m'a tant fait me casser la tête à créer! J'espère que mes élucubrations continuent à vous plaire! 

    Merci pour vos gentils commentaires!

    Joyeuse fêtes de fin d'année!

    Koe


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