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    - Tu avais raison de nous envoyer sur Yperis, Sham. souffla Arkab en lisant un message crypté. Quand y serons nous ?

    - Dans un peu moins de deux jours standards. Mais j’ai quand même une inquiétude.

    - A quel propos ?

    - Cette fille, soi-disant Johanne Paresc. Crois-tu qu’elle ait pu embobiner Hassan ?

    -  Embobiner Hassan ?

    - Après tout, pour une fille un peu rusée d’une vingtaine d’années, il ne doit pas être difficile de prendre un homme de cet âge par les sentiments, surtout si elle correspond à la description enthousiaste qu’il en a faite !

    - Tu sais, je ne crois pas que Loumé serait de son avis, dans ce cas !

    - Venegas nous a bien tous dupés depuis deux ans !

    -  Cesse ta parano ! Tu sais bien qu’on peut vérifier qu’il s’agit bien de la fille de Wendy Paresc !

    - Evidemment. Sa mère savait être toujours sur le fil du rasoir. Avant de disparaître, elle avait confié à Vega  que c’était l’enfant qui détenait une partie du secret de son refuge. Pour la reconnaître, elle doit avoir un tatouage en forme de dragon dans son dos.

    - C’est bien ce qui me semblait. Ce sera donc à toi de vérifier qu’elle dit vrai, mon vieux ! »

       Comme prévu, le grand croiseur interstellaire des révolutionnaires arriva à proximité de la planète Yperis deux nuits après avoir reçu le message de l’archéotech’. La présence d’un vaisseau amiral de l’Union l’obligea à rester dissimulé dans l’ombre de la lune noire.

       Arkab resta à bord, tandis que Sham descendait seul avec un chasseur furtif jusqu’à la surface de la planète pour prendre contact avec Hassan. Un champ de bataille l’attendait. Le chantier avait été bouleversé. Un cratère noirci béait à la place du bunker découvert par les scientifiques  et les cadavres des membres de la mission jalonnaient le sol. Avec désespoir, Sham reconnut Loumé et plus loin, Hassan, qui respirait encore. Il tomba à genoux auprès du vieil homme.

     - Hassan ! Oh mon Dieu !

       Le vieil homme ouvrit les yeux avec difficulté, le visage crispé par la souffrance.

     

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     - C’est toi, mon petit Sham ! murmura-t-il. Ils ont tout détruit, sauf le plus important ! Sous le rocher rouge… Là-haut… Les documents que… j’ai cherchés toute ma vie… Prends-les ! Et va sauver… la fille… de Wendy ! Elle pourra les déchiffrer ! Fais-lui… confiance !

     - Ne parle plus ! coupa Sham, un sanglot dans la voix. On va te soigner !

     - Inutile, mon garçon. Je veux rejoindre Loumé. Ils l’ont fusillée devant moi, mais je n’ai pas parlé. Va vite la… chercher ! Amalric va lui faire du mal… Il avait ce regard de fou dépravé ! Cours… Je t’en supplie…

       Sham ferma les yeux quand le vieil homme expira dans ses bras. Il se redressa brusquement.

     « Vous là-bas ! Plus un geste ! »

       Les deux sentinelles laissées par Amalric avancèrent vers lui, le blaster braqué sur son crâne. Il les laissa approcher, à l’affût. Dès que le plus proche fut à portée, il tira en plongeant au sol, évitant leurs rayons paralysants. Il fit mouche deux fois, songeant à Loumé et Hassan lorsqu’ils s’effondrèrent sans vie.

       Le cœur broyé par la rage et le chagrin, il récupéra les disques de données dissimulées par Hassan avant de rejoindre le centre de la colonie minière. Devant l’entrée du motel, le gérant tenait tête à un administratif de la mine.

     « Le colonel Amalric ne reçoit aucune visite. Il est avec la fille qui espionnait les traitres de la mission pour son compte ! Même qu’elle doit sans doute prendre une sacrée raclée vu le ton avec lequel elle lui parlait. Elle l’a accusé d’avoir tué des innocents et détruit un témoignage du passé ! Vous vous rendez compte ? Elle essayait de lui échapper tout en l’insultant ! Je serais le colonel, elle regretterait d’avoir prononcé de telles paroles ! Les bonnes femmes doivent respecter les hommes, vous croyez pas ? Leur place, c’est à la cuisine, et au lit ! »

       Sham pianota quelques mots sur son comlink.

     

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    Il avait besoin d’une diversion. Amalric était un personnage important de l’Union, donc surprotégé. Dix minutes plus tard, une escouade quitta le motel en trombe, Amalric au milieu finissait de boutonner la veste de son uniforme.

       Le gérant sursauta lorsqu’il reconnut le masque de celui qui pointait un blaster sur sa tête.

     « Numéro de chambre d’Amalric ? »

     L’homme balbutia une réponse et il expédia le bonhomme au pays des rêves d’un coup de crosse malgré son envie de lui arracher la tête. Il monta en courant à l’étage et entendit des cris de terreur étouffés provenant de la première chambre, des sons mats, la chair heurtant la chair. Sham s’approcha sans bruit de la porte de la chambre et appliqua son oreille contre le panneau de bois. Il entendit des gémissements étouffés, entrecoupés de sanglots, une voix rauque qui suppliait. Il frappa doucement à la porte.

     « Le colonel revient s’occuper de toi, salope ! Tu verras, tu vas finir par aimer ça et en redemander ! » fit une voix narquoise tandis que le gémissement se faisait plus sourd.

       Un soldat de l’union à demi-nu vint ouvrir et Sham l’exécuta, sans état d’âme.

       La jeune femme gisait à même le sol, entièrement nue. Sur sa peau, de nombreuses meurtrissures et des traces de sang trahissaient les coups et même les morsures qu’elle avait reçus. Elle pleurait doucement, inconsciente de ce qui s’était passé à la porte. Lorsqu’elle se recroquevilla sur elle-même, Sham resta figé, fasciné par le dos de la jeune fille : un splendide dragon vert déployait ses ailes sur sa peau. C’était donc vrai…

     

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    Suite du chapitre 3


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  • 3-2

    Il secoua soudain la tête, pour sortir de sa torpeur. Il devait la ramener au plus vite.

       Près de la porte, un dossier marqué "Johanne Paresc" était posé sur un sac de voyage. Il le feuilleta rapidement et lâcha un juron rageur avant de fouiller le sac : des affaires de femmes, sûrement les siennes mais il n’avait pas le temps de l’habiller.

       Avec beaucoup de douceur, il enveloppa la jeune fille dans un grand drap de bain et la souleva dans ses bras. Elle lui sembla extrêmement légère pour sa taille.

    - Je vous en prie, restez en vie ! murmura Sham.

      Johanne ouvrit les yeux, en entendant cette voix inconnue et perdit connaissance, à la vue du masque hideux de son ravisseur.  Chargé de son fardeau, il descendit l’escalier de service et rejoignit la navette qui l’attendait sur le chantier.

    - Beau boulot, Sham ! l’accueillit Arkab.

     

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    - Il faut partir immédiatement. annonça Sham. Continue les missions qui nous ont été confiées et préviens le Conseil. Je pars avec la fille. Est-ce que mon vaisseau personnel est prêt ?

    - Il le sera dans moins d’une heure. Et ton copilote habituel est déjà à bord. C’est bien elle ? demanda Arkab en désignant la forme inerte entre ses bras.

      Sans un mot, Sham repoussa un peu la serviette qui enveloppait la jeune fille et son ami hocha la tête en découvrant le tatouage.

    - Va donc, mon ami. Tu as raison. Nous continuerons nos actions pendant que vous chercherez les informations détenues par Wendy. Crois-tu pouvoir lui faire confiance ?

    - Je ne sais pas, elle était déjà sans connaissance lorsque je suis arrivé. Mais je l’interrogerai pendant notre petit voyage.

    - Amalric l’a salement amochée… Ça plaide en sa faveur, non ? Et elle est sacrément jolie, aussi !

      Sham serra les dents.

    - Ça n’a aucun rapport, si elle est une espionne de l’Union, jolie ou pas, elle le regrettera amèrement… Je n’ai pas l’habitude de me laisser berner à cause de ce genre de préoccupations !

    - Ne t’énerve pas ! Si tu penses qu’elle est de notre bord, tu dois l’emmener sur Aïrys. Seule sa fille peut retrouver…

    - Je sais ! Ce serait un très bon moyen de vérifier si elle dit vrai ! Car après tout, n’importe qui peut s’offrir un tatouage en forme de dragon !

    - Tu es vraiment trop méfiant ! Bonne chance, vieux ! »

      Sham sourit et emmena la jeune femme toujours inconsciente à bord de son propre appareil.

    - Ah! Monsieur Sham ! Quelle joie de retravailler enfin avec vous et ce vaisseau ! Oh ! Mais vous n’êtes pas seul…

     

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    - Je suis heureux aussi, Galois ! coupa Sham. Peux-tu préparer la chambre de soins, s’il te plaît ?

    - Bien sûr, monsieur !

      L’androïde glissa jusqu’à la porte de la pièce et tapa un code sur le clavier. La porte s’ouvrit et Sham allongea doucement la jeune femme sur la couchette.

    - Je peux effectuer moi-même la procédure, si vous le souhaitez, monsieur ?

    - Non, Galois ! Je veux m’occuper d’elle personnellement ! Va plutôt chercher le sac de la demoiselle que le commandant Arkab a dû faire monter et prépare le vaisseau pour le départ.

    - J’y vais, monsieur ! »

      Plus touché qu’il ne l’aurait souhaité, Sham caressa le front trempé de sueur de sa passagère avant d’abaisser sur elle le scanner magnétique. Le rayon passa trois fois sur le corps inerte avant que l’écran donne son diagnostic.

     

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    Aucune fracture, de nombreux hématomes. Sham crispa les poings en lisant la suite. La jeune femme avait été violée à plusieurs reprises avant qu’il ne puisse intervenir. À l’aide de compresses désinfectantes, il essuya doucement toutes les traces laissées par la cruauté du colonel Amalric. Lorsque le corps élancé fut nettoyé de toutes les souillures, il attacha la jeune femme au lit, à l’aide des sangles médicales de manière à ce qu’elle ne tombe pas pendant le décollage. Lorsqu’il la recouvrit d’une fine couverture, elle se mit à rêver à haute voix.

    - Donatien ! murmura-t-elle. Venez ! Venez à mon secours ! Aidez-moi ! Donatien !

      Sham écarquilla les yeux, et se pencha pour étudier le visage crispé.

    - Monsieur Sham ? Tout est paré pour le départ !

    - J’arrive tout de suite !

      Sham s’installa aux commandes et fit décoller son appareil.

    - Où allons-nous, monsieur ?

    - Je ne sais pas encore, Galois. Pour l’instant, nous nous éloignons de Yperis.

    - Que pensez-vous de Aïrys, monsieur ?

    - Toi, tu as été programmé par Arkab ! Mais tu as raison. Nous allons aller directement sur Aïrys. »

     

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    Crédits pour l'hyper vitesse: artbooktuto

     

    Suite du chapitre 3


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  • 3-3

      Une forte secousse réveilla Johanne qui ouvrit les yeux. Elle cligna plusieurs fois des paupières avant de retrouver une vision nette. À son grand étonnement, elle ne reconnut pas sa chambre sur le chantier. Une petite pièce aux cloisons claires, avec des appareils électroniques… Elle s’aperçut soudain qu’elle était sanglée sur une couchette, avec un simple drap comme vêtement. Affolée, elle songea à Amalric qui devait se trouver dans les parages. Tout lui revint par flashes : l’arrivée des soldats de l’Union sur le chantier, l’interrogatoire violent de toute l’équipe, l’exécution en terminant par Loumé puis Hassan, la destruction du site et… l’interrogatoire que le colonel lui avait infligé. Il voulait être sûr qu’ils n’avaient rien trouvé. Elle était restée muette… Jusqu’à quand tiendrait-elle ?

     

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      Elle s’aperçut à sa grande surprise que ses bras étaient libres. Les liens se défaisaient sans problème. Sans hésiter, elle les enleva tous et se leva avec précaution, le corps endolori. Son sac avait été posé sur le sol, et elle se dépêcha d’en sortir quelques vêtements. Une fois habillée, elle poussa la porte qui s’ouvrit. Stupéfaite de n’être pas enfermée, elle longea la coursive et pénétra dans le poste de pilotage d’un vaisseau. Un homme qu’elle ne voyait que de dos était aux commandes. À ses côtés, un androïde vérifiait des données.

    - Allez-vous mieux, mademoiselle Paresc ? demanda le pilote sans se retourner.

    - Oui, je vous remercie ! répondit-elle, surprise. Ce n’était vraisemblablement pas Amalric ! Mais… Qui êtes-vous ?

      Sham se retourna, et elle laissa échapper un petit cri à la vue de son visage masqué de noir.

    - Pas très beau, n’est-ce pas ? ricana-t-il.

      Johanne baissa les yeux.

    - Je suis désolée, je ne m’attendais pas à… Seriez-vous le commandant Sham, le révolutionnaire ?

      Celui-ci hocha la tête.

    - Je vois que mon masque assure toujours ma notoriété ! Asseyez-vous ! Nous devons avoir une petite discussion, mais pour l’instant, j’ai à faire. »

      Subjuguée par le ton impérieux, la jeune femme obéit, anxieuse de ce qui allait se passer.

      Sham termina quelques réglages et confia les commandes à Galois avant de se tourner vers Johanne.

    - À nous deux maintenant. Nous avons quelques petits détails à tirer au clair.

    - Avant toute chose, je veux savoir où je suis et où vous m’emmenez…

    - Vous n’avez aucun droit à de telles exigences. Vous êtes à bord de mon vaisseau et vous y resterez jusqu’à ce que je vous autorise à en sortir.

    - Je ne comprends pas…

    - Vous pouvez vous considérer comme ma captive, si c’est ce que vous voulez savoir ! Une captive de choix, d’ailleurs !

      Elle écarquilla les yeux, surprise.

    - Captive ? Mais pourquoi ?

    - N’êtes-vous pas la maîtresse du colonel Amalric ? insinua-t-il. Après tout, je vous ai trouvée nue dans son lit !

      Johanne sentit son regard s’embuer de larmes. Voilà donc ce que cet homme valeureux pensait d’elle. Elle songea avec douleur que tout le monde penserait ça désormais. Que pouvait valoir sa parole contre celle de cet homme ? Sans répondre, elle baissa la tête.

     

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    - Vous ne dites rien ? J’ai donc touché juste ! triompha-t-il. À votre avis, combien payera-t-il pour vous retrouver vivante ?

    - Sans doute rien. murmura-t-elle, abattue.

    - Auriez-vous donc si peu d’illusions sur votre amant ? demanda-t-il d’un ton narquois. Mais derrière le masque, l’expression du visage était attentive. Pourquoi ne réagissait-elle pas ? Pourquoi ne se défendait-elle pas ?

    - Vous ne comprenez rien ! souffla-t-elle. Et je ne peux vous en blâmer. Il n’est pas mon amant. C’est le démon le plus terrible que j’ai jamais dû affronter !

    - Dans un lit ? Car le dossier qu’il avait constitué sur vous et que je lui ai dérobé est assez explicite ! Manifestement, vos qualités dans ce domaine le fascinent !

      Humiliée une fois de plus, Johanne releva la tête et ses yeux verts étincelèrent de fureur soudaine.

    - J’ai supporté de telles insultes de la part de ce sale porc, mais j’imaginais qu’un homme tel que vous avait un peu de courtoisie et de décence ! J’ai toujours mené ma vie comme je l’entendais ! Et pourquoi me blâmer d’avoir agi ainsi que la plupart des hommes ? Je prends mon plaisir où je le trouve.

    - Cela signifie-t-il que vous êtes, de votre plein gré, allée dans la chambre d’Amalric, où je vous ai trouvée ?

    - Salaud ! hurla-t-elle en se levant. Comment pouvez-vous… Je vous méprise ! Salaud !

      Elle semblait prête à le frapper. Il secoua la tête.

     

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    - Je ne vous suggère pas d’essayer. murmura-t-il. Vous êtes épuisée et j’ai pour habitude de toujours rendre coup pour coup. Vous n'avez aucune chance.

    - Alors, ne vous avisez plus de m’insulter !

      Il hocha la tête, un sourire narquois sur les lèvres.

    - Rasseyez-vous. Et tâchez d’être sincère lorsque vous répondrez à mes questions, car pour le moment, seul le fait que vous êtes la fille de Wendy Paresc vous maintient en vie.

    - Ma mère ! soupira la jeune femme, calmée par cette évocation. Ne pourriez-vous pas tous vous souvenir que j’avais sept ans quand elle est morte ? Je ne sais rien d’elle ! Amalric m’a tenu des propos de ce genre, ce qui me conforte dans mon idée. Qu’ils soient de l’Union ou de la Révolution, les hommes sont exactement les mêmes, assoiffés de pouvoir et de domination. murmura-t-elle avec amertume. Alors ? Qu’allez-vous faire de moi maintenant ? M’emmener dans votre chambre dans le but avoué de me punir et de me guérir de mes insolentes révoltes ? Vérifier si je suis au niveau de ma réputation ? Faire de moi votre petite putain domestique dévouée ? lança-t-elle, se souvenant avec acuité des termes employés par Amalric. Je me demande juste quel chantage vous allez essayer d’exercer sur moi. Car Amalric bénéficiait au moins du pouvoir de me déporter sur la planète grise… Et vous ?

      Sham cessa de sourire, comprenant la révolte de la jeune femme. Ses paroles reflétaient bien ce qu’il avait trouvé dans le dossier d’Amalric. Mais il avait peur. Peur de se laisser tromper par ce regard anxieux qui lui rappelait un visage du passé. Peur de faire confiance à une inconnue. Venegas était des leurs depuis tant d’années et il les avait trahis froidement. Alors cette fille qui tombait quasiment du ciel…

    - Qui est Donatien ? demanda-t-il soudain.

      Johanne blêmit.

    - Je ne sais pas de quoi vous parlez !

    - Vous mentez, Johanne Paresc !

    - Vous êtes encore plus dangereux qu’Amalric ! lâcha-t-elle d’une voix étranglée. Vous avez accès à ma mémoire ! Comment savez-vous ça ? Comment pouvez-vous avoir l’impudeur de vous immiscer dans la seule intimité qui reste aux gens ?

      Sham comprit qu’il avait touché un point sensible pour la jeune femme. S’il ne voulait pas s’en faire une ennemie, il devait lui expliquer.

    - Ne vous affolez donc pas ! Je n’ai pas accès à votre inconscient ! J’ai simplement entendu des mots prononcés dans un rêve, lorsque je vous ai installée à bord ! Vous gémissiez et appeliez ce Donatien à votre secours. Je veux savoir qui il est et s’il risque de me mettre en danger ! C’est un sbire d’Amalric ?

      Johanne baissa la tête. Lorsqu’elle le regarda de nouveau, les larmes roulaient sur ses joues.

     

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    - Ce Donatien n’existe sans doute pas ! murmura-t-elle. Lorsque j’avais sept ans, dans un parc, j’ai rencontré un jeune homme qui pleurait. Ma maman venait de me raconter Peter Pan une très ancienne pièce de théâtre pour les enfants. Alors j’ai emprunté les mots de la pièce pour lier conversation avec lui et le consoler, comme faisait l’héroïne de la pièce avec le héros. Il devait avoir une vingtaine d’années. Et il s’appelait Donatien. Il a accepté mon cadeau, un lapin en peluche bleue, il m’a donné un baiser sur la joue et il est parti, un peu consolé. Sans doute aujourd’hui vit-il heureux sur une planète, et a-t-il oublié la petite fille et son cadeau, mais il n’en est pas de même pour moi. Ma mère est morte peu après. J’en ai fait mon ange gardien, je l’ai idéalisé. C’est une projection de mon imagination, qui réapparaît dès que j’ai des ennuis, et que j’ai besoin d’un soutien que personne de réel ne peut m’apporter.

      Elle sursauta soudain, et dans son regard durci se mit à briller une lueur dangereuse.

    - Vous êtes la seule personne de cette galaxie à connaître cette histoire. Si jamais quelqu’un d’autre devait en être informé, je vous tuerai, tout commandant Sham que vous soyiez !

      Sham se leva.

    - J’en ai terminé avec vous pour aujourd’hui, Johanne Paresc.

     

    3-3

     

      Il l’attrapa par le bras et la ramena de force dans la pièce où elle s’était réveillée. Il la poussa doucement à l’intérieur avant de verrouiller la chambre.

    - Ne m’enfermez pas ! cria-t-elle en frappant la porte de ses poings. Je vous ai dit la vérité ! »

      Sans répondre, il s’éloigna vers la seconde cabine et s’assit, l’esprit bouleversé par ce qu’il venait d’entendre.

    « Wendy Moïra Angela Darling, Johanne ! » murmura-t-il.

     Sur la commode, le lapin bleu le regardait d’un air pensif. Quinze années standard… Il avait une dette envers cette enfant devenue femme. Sans elle, il se serait tué cet après-midi-là, assommé par le désespoir, dans le parc. Il enleva précautionneusement le masque qui dissimulait la moitié de son visage et passa un doigt sur la fine cicatrice qui descendait de son œil jusqu’à la pommette. Il avait depuis longtemps recouvré l’usage complet de cet œil, mais ce masque hideux, utile jadis pour protéger la blessure servait maintenant à cacher son identité. Le fils gentil et naïf de Moïra Genery n’existait plus. Seul un révolutionnaire sans pitié et avide de vengeance nommé Sham s’était évadé de la planète grise pour rejoindre les mouvements contestataires.

     

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      Sauf lorsqu’il regardait le lapin bleu. Alors la petite fille surgissait de sa mémoire et lui demandait « Petit garçon, pourquoi tu pleures ? ». Un court instant, l’idéaliste Donatien Fox-Genery revenait, mais Sham reprenait vite le dessus. Les paroles révoltées, les accusations de la jeune femme avaient touché leur cible. Il n’aimait pas ce qu’il était devenu mais il n’avait pas eu le choix. Il posa la main sur la peluche bleue qu’il dissimula dans son placard. Il remit son masque pour rejoindre l’androïde.

    - Quand arriverons-nous sur Aïrys, Galois ?

    - Demain matin, nous y serons monsieur.

      Sham hocha la tête et reprit les commandes. Il avait pris sa décision. Johanne Paresc était sincère. Il la mènerait jusqu’au sanctuaire de sa mère. Néanmoins, il ne lui causerait aucun chagrin en lui montrant ce que “son” Donatien était réellement. Il n’avait pas le droit de détruire son rêve.

    Chapitre 4


    Bonne année à tous et bonne santé. Que 2013 vous soit propice!

    Pour moi, j'ai pris de bonnes résolutions: je ne plus massacre complètement mes personnages féminins... Oui, bon, l'Union est une histoire que j'ai écrite il y a au moins 5 ans, donc ça ne compte pas!

    A part ça, voilà la première deuxième rencontre entre Han et la princesse euh non, entre Johanne et Sham/Don. La confiance règne, n'est-ce pas. Et comme tout gars qui se respecte, môssieur est plein de tact. (non, non, je ne fais pas de sexisme, pas du tout!)

    Je sens que certain(e)s vont râler: pour une fois qu'on voit le Sham sans masque, ce n'est pas un gros plan. Alors en fait, si on compte que je lutte avec la rentrée scolaire, 4 gastro depuis 3 jours (la mienne, celle de mon chéri et celle des 2 gamins), que mon ordi a planté juste après la dernière photo de cette maj, vous supporterez bien une petite attente encore un peu, n'est-ce pas? (Edit: j'ai mis à jour ma rubrique Portraits si vous voulez le voir de plus près)

    Sinon, je me suis rendue compte que dans mon intro, j'avais oublié de citer ma toute première inspiration en matière de ScienceFiction, bien avant le Starwars: Yoko Tsuno et son créateur Roger Leloup. Une bonne part du background technique en est fortement inspiré.

    Sur ce, merci de continuer à lire ma petite histoire et portez-vous bien! (sans gastro: elle est rudement maléfique cette année)

    Bises

    Koe

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